aliments entreposés dans le carré
Apprendre à naviguer,  Choisir et équiper son voilier

Avitailler son voilier pour une croisière: le casse-tête des listes et du rangement


Avitailler son voilier est probablement le moment le moins amusant de la préparation d’une croisière. On a toujours peur d’oublier quelque chose et on n’a qu’une envie devant le rayon des conserves: abandonner son chariot et prendre la mer le plus vite possible! Si seulement vivre de sa pêche était une option crédible! Une ligne, un hameçon, un leurre et du riz suffirait. Mais c’est un pari vraiment risqué….

De plus si la technique de la liste d’avitaillement reste la plus universellement répandue, la question du rangement est assez peu abordée.

Et pourtant le plus organisé des plaisanciers finit toujours par douter lorsqu’il compare le volume des caddies alignés devant son étrave à celui de son bateau. Où diable stocker tout ce bazar? Pourquoi les rouleaux de PQ sont-ils toujours aussi encombrants? Et l’eau minérale? Qui peut bien boire autant de flotte, sérieusement?

bouteilles d'eau minérale

Dans cet article nous verrons donc comment rédiger une liste d’avitaillement cohérente, puis je partagerai mes quelques trucs pour un stockage rationnel de la nourriture à bord. Et en prime je vous laisserai en téléchargement une liste « confort » de divers produits et objets qui vous permettront de partir en mer à l’impromptu sans vous soucier des courses à chaque fois!

De l’importance de bien manger à bord: énergie et convivialité

Pour vous motiver à bien avitailler votre voilier, je voulais partager à quel point cela peut changer l’ambiance de votre croisière!

Nous ne naviguons pas en course!

Oublions les lyophilisés insipides et l’eau désalinisée des skippers du Vendée Globe! Nous avons le temps, et quand nous avons la chance d’en avoir nous tenons à garder nos équipiers. Pour cela, pas de secret: il faut soigner la convivialité.

De là à cuisiner un bœuf bourguignon tous les soirs me direz-vous, ce ne sont plus des vacances!Et bien, tout dépend du confort de votre bateau et de la motivation des cuisiniers potentiels! Personnellement si j’en ai la possibilité, j’aime bien préparer ce genre de plat AVANT une traversée par exemple. Évidemment il vaut mieux que tout le monde soit amariné pour bien en profiter, ou que la mer soit belle…

Quoiqu’il en soit, la mer ça creuse: une bonne alimentation est un gage non seulement de bien-être à bord mais aussi de sécurité! L’équipage est de bonne humeur, soudé par de bons diners partagés, et peut donc compter sur toutes ses forces pour manœuvrer.

Comment faire une liste d’avitaillement?

Il existe plusieurs méthodes pour résoudre le problème. Par exemple on peut décider de manger des sandwichs à midi et de diner au restaurant tous les soirs. Franchement, ça peut marcher pour un week-end, mais au-delà vous allez vous lasser.

Il est également possible de jeûner, et dans ce cas inutile de poursuivre la lecture de cet article. Cependant ce n’est pas très compatible avec la sécurité en mer. Sur l’eau nous dépensons généralement beaucoup de calories, donc attention à l’hypoglycémie qui vous empêchera de prendre les bonnes décisions.

La technique des menus

Plus sérieusement, je propose de démarrer le programme convivialité par une séance de brainstorming devant un café et des croissants. Vos équipiers fraîchement embarqués se sentent accueillis et tout de suite impliqués dans l’organisation de la croisière. Le but de la séance est de créer une liste de menus variés pour 4 ou 5 jours, avec des recettes que les uns et les autres se sentent capable de cuisiner à bord. Ensuite vous en déduisez les quantités nécessaires, puis vous les multipliez par deux pour une croisière de 8 jours, par 3 pour 15 jours, facile!

cuisiner sur un petit voilier

Évidemment il faudra inclure dans ces menus les petits déjeuner, les en-cas ou goûter, l’apéro (mais ça personne n’oublie) et ajouter les produits d’hygiène à la fin.

Comme vous naviguez généralement près de zones civilisées, vous aurez l’occasion d’acheter des vivres frais à terre. Légumes, fruits, viande, pain: tout ceci peut-être renouvelé tous les 3-4 jours à la faveur d’une escale.

Mais n’hésitez pas à charger tout le reste dès le départ. Sans voiture, conserves, pâtes, et boissons diverses sont des produits lourds et encombrant à transporter. En plus si il est plaisant de papoter avec le boucher ou la boulangère tous les matins, les achats de PQ et tomates en conserve en supermarché dégagent moins de poésie. Autant s’en débarrasser une bonne fois.

Réutiliser d’anciennes listes d’avitaillement?

Une fois l’opération précédente réalisée et testée, cela vaut la peine de garder votre liste et vos menus pour une prochaine croisière. Si vos équipiers ne décident pas de modifier vos menus en profondeur vous pourrez avitailler votre voilier en ajustant simplement les quantités au nombre d’équipiers.

Les plus organisés pourront réaliser des tableaux excel pour convertir les menus en liste détaillée et ajustable.

Cependant la réutilisation des anciennes listes comporte quelques limites à mon avis.

Selon le programme de votre croisière vous serez plus ou moins enclin à cuisiner et vos besoins caloriques ne seront pas les mêmes. Naviguer en Bretagne ou en Méditerranée au début du printemps sont deux expériences de navigation assez différentes par exemple…

Ensuite si vous louez un voilier loin de chez vous, vous ne trouverez pas vos ingrédients habituels. Enfin vos prochains équipiers seront peut-être vegan, ou bien allergiques aux spaghettis bolognaise.

Quoiqu’il en soit, la méthode des menus est fiable, éprouvée et responsabilise immédiatement votre équipage. Je vous la recommande chaudement!

Où ranger les aliments à bord d’un voilier?

Au moment de ranger l’avitaillement vous allez avoir différentes questions à résoudre.

La conservation des produits périssables

Pour les fruits et les légumes, des filets suspendus ou des tiroirs bien aérés (ajourés) sont idéaux.

Si vous n’avez pas de réfrigérateur, vous trouverez en principe plus de fraîcheur dans les fonds. Par temps froid, vous pouvez aussi entreposer certains vivres (fromage…) dans des tupperwares dehors, sous la capote par exemple.

Les œufs se conservent en dehors du réfrigérateur, dans leurs boîtes en carton pour amortir les chocs.

Le pain moisit dans les sacs en plastique. Si vous le gardez dans un torchon, ou dans une boite métallique, ou les deux, il tiendra deux fois plus longtemps.

Ne stockez JAMAIS le lait en briques, dans les fonds.Les briques prennent l’humidité, perdent leur résistance, et vous vous en apercevrez quand le lait aura caillé. Imaginez, du lait qui circule librement dans les fonds du bateau et qui caille… oui, c’est du vécu.

J’ai d’ailleurs découvert à la suite de cet incident que je pouvais faire de très bonnes crêpes avec du lait en poudre.

Si vous prévoyez de garder certaines conserves longtemps à bord, marquez les au feutre indélébile. Ainsi vous saurez ce qu’elles contiennent même si elles perdent leurs étiquettes.

Enfin il est préférable de placer les produits les plus lourds dans les fonds (sauf le lait en brique) et les plus légers dans les équipets latéraux. Les poids seront mieux répartis et en cas de coup de gîte violent, vous risquez moins d’accidents.

Quant aux rouleaux PQ, si vous ne savez plus où le ranger, ils sont très efficaces pour caler les bocaux et la vaisselle dans les placards.

L’accessibilité des vivres

Mettons que vous envisagiez une traversée de deux ou trois jours. Dans ce cas vous devrez cuisiner en mer. Peut-être au près, bateau gité… Et si ça se trouve il y aura même des vagues!

Donc il s’agit de faciliter au maximum la tâche du cuisinier. Il ne faut pas qu’il ait à chercher les nouilles sous le siège situé en pied de mât. Sinon gare au mal de mer! De ce fait, même si votre logique vous invite à ranger chaque classe d’aliment au même endroit, il faut assouplir la règle. Une partie suffisante des aliments de base doit absolument être au plus proche de la cuisine.

préparation du repas en mer

Maintenant passons aux quarts de nuit. Il fait frais, vous vous endormez. Un bon petit café instantané vous réveillerait tout en vous réchauffant. Sauf que le café est rangé derrière la tête de l’équipier qui dort dans la bannette tribord du carré. C’est ballot, non?

Le raisonnement vaut aussi pour les barres de céréales et le PQ. Sans doute moins pour l’apéro 😉

Prévenir les cafards

Ce dernier problème survient plutôt sous les tropiques, mais il quand il survient c’est presque déjà trop tard.

Pour ne pas voir proliférer ces petites bêtes, laissez tous les emballages en carton sur le quai. Aucun carton ne doit mettre le pied à bord!

Inspectez également tous les fruits et légumes avec attention.

Ensuite pour neutraliser les œufs qui pourraient se dissimuler dans le riz et les pâtes, versez les dans de grandes boîtes de conservation en plastique, dans lesquels vous aurez placé des boules de coton imbibées d‘alcool camphré. Les vapeurs d’alcool vont tuer une partie de larves et le camphre va dissuader les cafards de s’y reproduire. Je sais c’est sale, mais la nature est ainsi.

A titre de prévention vous pourrez aussi placer des pièges à cafard dans quelques recoins sombres proches des zones de stockage des vivres.

Une liste d’avitaillement de base pour être toujours prêt à partir

Qu’il serait bon de pouvoir prendre le large à l’improviste, sans se taper toutes ces listes, ces menus et ces courses.

A mon avis avec un peu d’organisation préalable c’est tout à fait possible.

Je pense que selon la taille de votre bateau, vous pouvez stocker de quoi vivre à bord un week-end dès le début de votre saison de navigation.

Voici donc à télécharger ou à imprimer une liste « confort », d’aliments, de produits d’hygiènes mais aussi de divertissement, que je vous propose d’embarquer dès que vous recommencerez à naviguer. Cette liste est issue d’un bonus inclus dans la formation météo et navigation côtière.

Bien sûr vous devrez l’adapter à la place dont vous disposez et à vos goûts.  Mais déjà, grâce à elle, vous n’oublierez plus les allumettes!

 


10 Comments

  • Cuingnet Hélène

    Bonjour
    Pour la liste de confort dans mon sac spécial location j’ai aussi le tire bouchon ouvre boite, les pinces à linge 😉 et un tube de lessive à froid.

  • Katell

    Excellent ça Hélène! Un sac spécial location!
    Pour moi le tire-bouchon ouvre-boîte est inclus dans la vaisselle.
    Si les loueurs n’en mettent pas à disposition, honte à eux!
    Je vais rajouter les pinces à linges par contre, c’est très utile, merci 😉

  • Jérôme

    Merci beaucoup pour ces excellents conseils. Jamais je n’aurais pensé aux cafards mais j’ai pas encore navigué dans les tropiques. Qui sait, un jour ce sera peut-être d’actualité ici aussi, mais d’ores et déjà je bannirai les cartons (en fait je préembale déjà plein de choses).

    Perso j’aime bien pré-peser des ingrédients en sachets congelation. Je fais des sachets de farine en plusieurs poids, de même pour le sucre en poudre, riz, pates… Bien penser à marquer les poids au marqueur dessus. Et j’emporte depuis quelques années un pot de beurre clarifié qui reste utilisable s’il fait pas trop chaud (pas plus de 25-26°C) donc sans encombrer le frigo. Très pratique pour faire la béchamel ou d’autres sauces.

    J’aime bien faire des plats qui vont au four, gratins, lasagnes, tartes… Ca cuit tout seul et en général ça a du succès. A toutes les croisières je fais au moins une tarte à la tomate aggrémentée de thon, champignons et lardons, oignons ou autres selon l’humeur du moment et les gouts de chacun. Avec les sachets de farine pré-pesés la pate brisée se fait en un clin d’oeil. J’emporte donc toujours un petit rouleau de patisserie en silicone (je galère trop avec une bouteille), un verre gradué de 0.5l et plein de papier sulfurisé (ça évite d’avoir à fariner le plan de travail, déconseillé dans un si petit espace).

    Je rajoute lait en poudre, pinces à linge à ma liste…

    • Katell

      Cela fait plaisir de voir à quel point naviguer ne consiste pas uniquement à tirer sur des bouts! Avec votre témoignage on sent bien que vous savez prendre le temps de vivre 🙂

  • Fabienne Feillel

    nous préparons toujours des bocaux : couscous, joues de porcs au cidre,,, juste ouvrir et réchauffer !
    le moral de l’équipage est dans l’assiette 😉

  • Grar

    Merci Katell pour ce petit guide
    Perso je prépare le premier repas du soir , la veille du départ, il n’y a qu’à réchauffer.
    Je mets la viande sous vide, les champignons frais émincés, la salade, la menthe pour les taboulés ou ti punchs, ça se garde sans problème une semaine.
    En mer nous cuisinons les goûters, crumble, pâte levée, gâteau de semoule, far,…

  • Ivan

    Encore un article plein de bon sens 🙂

    Pour les « accessoires », penser aussi à prendre quelques boîtes d’allumettes dans des boîtes étanches, lors d’une transat, nous avions 2 briquets chalumeau, un jour, l’un des briquets est tombé sur la gazinière allumée, POUF !, une belle flamme, une belle frayeur, mais plus qu’une seule possibilité d’allumer le gaz pour les 2/3 de la traversée…
    Pour cette transat, j’avais préparé des plats sous-vide (choux aux saucisses, sauté de veau, joues de porc,….). ça fait partie du projet, un peu comme l’avent et Noël.
    J’ai fait des menus pour une semaine, et multiplié par 3.
    Sur les conseils de mon fils cuisinier, j’ai stérilisé les sacs après la mise sous vide 20 min dans l’eau bouillante.
    Attention, il faut prendre des films résistant à 120°, pas les films qu’on trouve en 1er prix qui ne tiennent que jusqu’à 70°.
    A bord, c’est top, en particulier quand ça bouge, il suffit de faire chauffer le sac dans de l’eau, et hop ! dans l’assiette.
    L’avantage des sacs par rapport aux bocaux, c’est qu’ils ne prennent plus de place après utilisation, et je n’ai pas eu besoin de les ramener….

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