communication en mer par satellite
navigation électronique et météo,  sécurité

De la VHF à Starlink: comment la technologie peut sauver des vies mais pas la planète


Avez-vous connu le temps où les voiliers ne disposaient que d’une VHF fixe, et éventuellement d’un émetteur BLU pour les appels de détresse? Aujourd’hui les moyens de communication en mer se développent si rapidement qu’il devient difficile de se tenir informé des possibilités à notre disposition.

Au même moment, à différents endroits du globe, on assiste ainsi à des opérations de sauvetage déclenchées et coordonnées de manière très différente selon les technologies mises en jeu.

Du miroir de détresse au téléphone satellite un énorme fossé se creuse entre les marins. il arrive même comme nous allons le voir que les plaisanciers soient plus rapides et efficaces que les Centres de coordination et de sauvetage, grâce à leurs antennes Starlink.

Voici donc 3 situations de sauvetage utilisant toutes des moyens de communication différents, et souvent plusieurs en même temps, pour une plus grande efficacité certes, mais pas seulement…

Une balise de détresse qui envoie des textos

Pendant la Golden Globe Race 2022, Tapio Lehtinen, un skipper finlandais expérimenté, a déclenché sa balise de détresse alors que son voilier, Asteria, coulait rapidement au large de l’Afrique du Sud.
Depuis son radeau de survie, malgré la perte de ses lunettes, Tapio a réussi à envoyer de courts messages textos aux organisateurs de la course grâce à sa balise Yellowbrick. Ces messages ont fourni des informations précieuses sur les circonstances de son naufrage et ont permis de rassurer les organisateurs sur son état de santé.
Lorsque Kirsten Neuschafer, une autre concurrente de la course, s’est déroutée pour porter secours à Tapio, la radio VHF est devenue le principal moyen de communication entre eux. Grâce à la VHF, Tapio et Kirsten ont pu se coordonner et se guider mutuellement dans les eaux tumultueuses de l’océan Indien.

Coulés par une baleine, sauvés grâce à la technologie Starlink

Le 13 mars 2023, le voilier Raindancer a coulé suite à une collision avec une baleine entre les îles Galápagos et les Marquises. Malgré le fonctionnement de la balise de détresse EPIRB, ses passagers ont été sauvés en grande partie grâce à un réseau de voiliers alertés utilisant des liaisons Starlink.

Après l’accident, l’équipage de Raindancer s’est réparti entre la survie et le dinghy, amarrés l’un à l’autre. Le Skipper a utilisé son Iridium, avec seulement 10 % de batterie restante, pour appeler un voilier ami, qui disposait d’un Starlink à bord. Grâce à cette connexion satellitaire à haut débit, cet ami a créé un groupe WhatsApp et Facebook pour échanger instantanément avec d’autres voiliers dans la zone, notamment la flottille des participants au Rally World ARC, mais aussi avec la famille du skipper et les centres de coordination de sauvetage maritime (MRCC) du Pérou et d’Alameda.

Cette communication en mer rapide et efficace a permis au catamaran Rolling Stones, qui ne faisait pas partie de l’ARC, de sauver l’équipage de Raindancer après dix heures. Bien que le signal de l’EPIRB ait été capté par le MRCC, comme l’ont confirmé les US Coast Guard, l’appel du skipper à son ami en mer a permis de communiquer beaucoup plus rapidement avec toutes les parties impliquées.

Perdus sans électricité au large du Delaware

L’US Coast Guard a rapporté en décembre 2022 le sauvetage de deux marins à bord du voilier Atrevida II après une vaste recherche couvrant plus de 34 000 km² d’océan. Le voilier a été localisé à environ 344 km à l’est du Delaware par l’équipage du navire-citerne Silver Muna.
Les deux marins, Kevin Hyde, 65 ans, et Joe Ditomasso, 76 ans, ainsi que leur chien, étaient partis d’Oregon Inlet en Caroline du Nord. Ils se rendaient de Cape May, New Jersey, à Marathon dans les Florida Keys. L’Atrevida II n’avait plus de carburant ni d’électricité, ce qui rendait inopérants leurs radios et équipements de navigation. Privés de moyens de communication, les deux marins ont attiré l’attention de l’équipage du Silver Muna en agitant leurs bras et un drapeau.
L’histoire ici ne dit pas pourquoi les 2 marins se sont perdus en mer. Mais il semble qu’en l’absence d’électronique il n’aient pas été en mesure de retrouver leur chemin, ni d’appeler à l’aide.

Une efficacité décuplée…

Au final nous pourrions nous contenter de tirer des conclusions pratiques en terme d’amélioration de notre sécurité en mer à partir de ces trois situations.
Difficile en effet de contester l’amélioration de l’efficacité des secours en mer à partir du moment où suffisamment de navigants sont équipés des dernières technologies de communication.
La redondance des appareils apparait aussi clairement comme un facteur de sécurité supplémentaire. En cas de défaut des sources d’énergie, ou d’évacuation du bateau, les balises et les téléphones portables sont de précieux alliés. En ce sens l’antenne Starlink ne remplacera pas forcément l’iridium go. les 2 sont complémentaires comme le montre le cas de Raindancer.

…pour un coût écologique qui interroge.

Devons nous réjouir de ces « progrès » alors que ces technologies ont un coût écologique non négligeable?
Pour alimenter nos moyens de communication en mer il nous faut produire toujours plus d’électricité à bord, ce qui signifie plus de panneaux solaires et de batteries.
Ensuite le déploiement massif des satellites Starlink pose énormément de questions environnementales: pollution lumineuse, génération de débris spatiaux, obstacle à l’observation astronomique. Avec Starlink nous ne verrons plus jamais le ciel de la même façon…
Et puis cela nous met face à l’impact de la navigation sur la vie marine, qu’elle soit de plaisance ou professionnelle d’ailleurs. Car dans ces 3 histoires ,si nous savons que tous les marins ont été sauvés, nul ne sait ce qu’est devenue la baleine…

 


16 Comments

  • Jean-Yves FRICAULT

    Bonjour Katell.
    Je suis justement en train de réfléchir au meilleur moyen de communication pour équiper mon bateau: Iridium Go ou Starlink. L’avantage de Starlink est quand même de pouvoir télécharger les fichiers météo beaucoup plus vite. De plus lors de l’atterissage on peut télécharger les images google earth qui donnent une vue incomparable des entrées de ports. Enfin 3ème avantage, à l’arrivée d’un port on n’a pas besoin de courir les magasins pour acheter (au prix fort) une carte sim pour le téléphone. Bien sûr l’abonnement maritime reste cher mais celui d’Iridium n’est pas donné non plus pour un service nettement moindre. De plus le matériel Starlink a priori est moins cher que l’Iridium: Pas besoin d’acheter le plat maritime, selon certains navigateurs le roam fonctionne également en pleine mer à condition d’avoir souscrit l’abonnement maritime.
    Voilà où j’en suis. Je me reserve encore quelques mois avant de prendre ma décision. L’installation par l’électricien de Langkawi devrait se faire en septembre.
    Bien à toi,
    Jean-Yves

    • Katell

      Je n’ai pas vu encore beaucoup de monocoques équipés. Tu as un catamaran? Mais si Starlink confirme sa compatibilité avec les monocoques (est-ce que ça marche si le bateau gite?), Iridium a du souci à se faire. Ils ne vont rapidement plus rien vendre. Par ailleurs ils ne garantissent pas une couverture sur tout l’océan, donc prudence sur ce point si tu sors des routes les plus fréquentées.

    • Philippe ALEXIS

      Bonjour Katell,

      Ne faisons pas comme nos gouvernants à interdire ou pas l’utilisation d’internet à bord.
      C’est une question de discipline personnelle.
      Personnellement si j’avais un accès quelque soit le lieu (en dehors de la zone cotière) à des fichiers météo et à une messagerie pour récupérer mes mails et répondre de la façon la plus groupée possible afin de rassurer mon entourage, c’est-à-dire 2 accès quotidiens, cela me suffirait amplement.
      Je serai prêt à payer 1€ l’accès soit 60€/mois ou le juste prix de ces communications à l’unité afin que la notion de forfait n’entraine pas une sur consommation et ses conséquences pour la planète.
      C’est ce dont je disposais via un Irridium lors de mes portions de transat.

      Cordialement

  • cyber

    Bonjour,

    Starlink c’est vraiment génial . Si j’avais un bateau cela me permettrai d’avoir windy par exemple pour la météo. Et aussi les tuto de la croisière pour avoir des tutos en direct quand j’en ai besoin 🙂
    Mais geek et eau salée est-ce compatible ?

      • cyber

        Très juste ! je me demande s’il faut aussi prendre de la nautamine dans ce cas là.

        Bon j’ai quand même passé mon permis VHF SRC en préparation. Un peu inspiré par les tutos de la croisière il faut dire.

        J’avais rencontré des revendeurs de starlink dans le salon de la cybersécurité à Bruxelles, ils proposent starlink aussi pour la navigation. La question de l’orientation de l’antenne est effectivement une question d’importance,
        Pour plus d’info pratiques:
        « STARLINK MARITIME
        Global maritime coverage for boats of all sizes with up to 220 Mbps download while at sea. Starting at 294 €/mo with a one-time hardware cost of 2 939 €. »

        220 Mbps cela veut dire à peu prés(!) 22 Moctets par secondes. Ce que j’avais à l’hôtel il y a pas longtemps. Mais attention ! pour certaines applications c’est pas top : Il n’y a pas que la bande passante qui compte ! il y a aussi la Latence (temps que met un paquet pour aller de l’émetteur au récepteur).

        • Isabelle

          Bonjour,
          Si j’avais mon propre bateau oui j’installerai Starlink. Suite à maivaise expérience en Croatie, cartes obsolètes zones non connus par le skipper prof, etre la seule à parler anglais et à avoir une carte sim europe/monde j’ai installé navionics sur mon ipad et Windy et nous avons fait fait 2 semaines de cours et traversée comme cela. Obligé de rester près des côtes pour du réseau…
          De plus pouvant travailler de n’importe où avec un ordi portable… je pourrais travailler de mon bateau !

          • Katell

            Merci Isabelle de ce témoignage, mais Navionics, une fois les cartes téléchargées ne nécessite plus de réseau. Pour la météo, en dehors des situations instables (orages, dépressions) vous pouvez vous fier aux prévisions à 3 jours de Windy, c’est déjà très précis.

  • Ronan Kerautret

    Bonjour,
    J’ai vu la vidéo de Black Lion quand elle a été mise en ligne. J’avoue ne pas avoir suivi. J’en étais resté à un débit fibre pour 65 USD environ de mémoire.
    Le couple n’en revenait pas lui-même.
    Ce que j’apprends ici tempère quelque peu l’effet WHAOUUUUUUU !
    Pourquoi bouder la technique à un prix modéré, sans exclure le contrôle de tous les autres moyens à disposition, bien entendu.
    J’ajouterai simplement qu’Orange a signé une join venture avec Thales et Airbus, pour (en gros), concurrencer Starlink. Et il me semble qu’il y a d’autres constellations dans le match.
    Quand on sait le nombre de satellites nécessaires à une couverture optimale, ben on se dit que l’injonction « sortez couverts ! » n’a jamais été aussi appropriée 😁
    « Pourvu qu’ça dure ! », comme disait PPDA dans les guignols… Autre triste sire.
    Bonsoir.

  • Tadeusz

    Ce sont des questions, Katell, que je me posais très sérieusement (voir http://naveganteonline.com/elaborant-le-projet/) pendant la préparation de Kif Kif pour ma prochaine aventure en solo autour du monde, et auxquelles je crois avoir répondu en assumant pleinement –bien que sans plaisir– les contradictions qu’elles impliquent: oui, j’installerai une antenne Starlink à mon bord. Mon Iridium sera aussi à bord, en redondance, ainsi que ma BLU. Trop ? Peut-être… Je vous en dirai plus quand je serai au large… Ah ! Et pour protéger le tout de la foudre, capricieuse et récurrente, j’installerai en tête de mât un système DDCE (Dispositif d’équilibrage des champs électriques variables).

  • Patrick PENNEQUIN

    Bonjour Katell
    Nous naviguons sur monocoque depuis plusieurs années en Méditerranée. Nous ne sommes pas souvent plus de 12 heures sans téléphone(abonnement Orange) et jamais plus d’une soixantaine d’heures. Après avoir discuté avec des amis équipés Starlink nous n’avons pas basculé sur cette solution au vu du rapport utilité/coût et consommation électrique car nous n’avons pas besoin d’Internet professionnellement étant en retraite et les prévisions météos telles que nous les vivons depuis un an ne nous poussent pas à le faire….

  • Antoine

    Après avoir installé Starlink sur mon monocoque, il faut admettre que le rapport coût / débit est bluffant. 330 Mb/sec c’est mieux que la 4G et mieux que la 5G de Free (mais nettement en retrait par rapport à la 5G d’Orange). L’installation en 12V ne pose pas de problème majeur, et l’ensemble (avec un routeur 3G/4G/5G PepWave) consomme entre 2 et 3A…
    Non, vraiment le seul gros souci de toute cette technologie est ailleurs : le coût environnemental est immense, indécent, stupide… Mais voilà, ils ont envoyé leurs satellites et ils sont bel et bien en orbite, que tu t’en serves ou pas. Le boycott ? Cela ne les empêchera pas de tourner au dessus de nos têtes. Mais si on pouvait virer tous ces trucs d’un coup de baguette magique, je serais le premier à revenir à la BLU qui, quand on sait s’en servir, donne de bons résultats – tant que le bateau flotte…

    • Katell

      C’est aussi mon sentiment. Si Iridium divisait son abonnement par 4 ou plus, ça se discuterait, mais là, sans régulation, je pense que le coût environnemental n’arrêtera pas beaucoup de plaisanciers, ni de camping-caristes d’ailleurs.

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *